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Des silhouettes floues qui se détachent au loin, à la jonction d’une forêt et d’une plage. Voilà l’image que l’on connaît du peuple de l’île de North Sentinel, au large de la Birmanie. Ces hommes et ces femmes gardent un rivage insulaire que l’on n’aborde pas. On ignore tout d’eux, même le nom qu’ils se donnent, celui qu’ils donnent à leur île, leur abri de 60 kilomètres carrés encore coupé du monde.
Le peuple de North Sentinel ne veut pas être dérangé. Ni par des anthropologues curieux, ni par des illuminés comme le missionnaire américain John Allen Chau, tué par les habitants de l’île entre le 16 et le 18 novembre, peu après y avoir posé le pied.
Le missionnaire évangélique qui prenait North Sentinel pour le « dernier bastion de Satan », selon les mots écrits dans son journal intime, s’était mis en tête de convertir à lui tout seul sa population au christianisme évangélique, selon la doctrine d’un groupe prosélyte de Kansas City (Etats-Unis), All Nations.
Il s’attaquait pourtant au seul peuple à avoir réussi à maintenir son indépendance dans l’archipel d’Andaman qui, avec celui de Nicobar, forme un chapelet d’îles traçant une courbe imaginaire entre l’extrême sud-ouest de la Birmanie et le nord de l’île indonésienne de Sumatra. North Sentinel mise à part, ce territoire où s’exerce la souveraineté de New Delhi est majoritairement peuplé de colons venus du sous-continent indien.