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Alimentation Les produits bios reculent un peu dans les supermarchés, mais ce sont surtout les indépendants spécialisés qui souffrent.
Inflation oblige, et en prévision des factures à venir (primes maladie, électricité), les Suisses revoient leur budget alimentation et le bio a moins la cote. La viande n'est pas seule à en subir les effets, précise le porte-parole de Migros Tristan Cerf: « C'est un phénomène qui touche tout l'assortiment. Cela ne signifie pas que les ventes du bio s'effondrent. Mais il faut noter que l'assortiment traditionnel s'est fortement amélioré ces dernières années, ce qui joue peut-être un rôle dans l'attractivité des produits non bios, mais peut-être labellisés IP-Suisse. » En 2021 pourtant, le chiffre d'affaires des aliments bios avait pour la première fois franchi la barre des 4 milliards de francs.
Sur le long terme en effet, ce segment ne cesse de croître, rappelle-t-on chez Lidl: « Nous constatons une augmentation annuelle du chiffre d'affaires, avec plus de 10% de nos produits alimentaires certifiés bios. » Toutefois, nuance le porte-parole Mathias Kaufmann, « il est difficile de prévoir si cette tendance positive se poursuivra dans les prochains temps » .
Hausse des prix et pénuries
Pour sa part, Coop reçoit des « demandes d'adaptation de la part de différents fournisseurs en raison de la hausse du prix des matières premières, de la pénurie de matériaux d'emballage et de la hausse du coût des transports et de l'énergie » . Aldi enfin souligne son attachement à « soutenir la population dans ces moments difficiles » .
Si un tassement du bio s'observe donc chez certains détaillants, le coup est plus rude pour les petites enseignes indépendantes. « Les affaires ont chuté dès le début de la guerre en Ukraine, explique Catherine Matthey, propriétaire du magasin Céres Autrement, à Neuchâtel. Les clients viennent plutôt une fois par semaine au lieu de deux ou trois fois, et achètent moins. »
Du côté du marché participatif La Fève, à Meyrin (GE), Sabine Bally constate des difficultés à se maintenir au nouveau de 2021, « alors que nous avons doublé la surface » . Plus inquiétant, alors que l'enseigne se trouve au cœur de l'écoquartier des Vergers, seuls 10% des habitants sont devenus membres de la coopérative. « Comme si une partie des gens ne se sentait pas légitimée à participer à ce type de projet » , avance-t-elle.
Producteurs inquiets
Ahmed Kalkoul, propriétaire de la Ferme des Chardonnerets, à Thielle (NE), estime que les ventes « ont reculé de 30% à 40% » , notamment lors de ses déplacements sur les marchés. « Durant le Covid, il y a eu une prolifération de petits marchés, de nouvelles petites enseignes, d'achats à la ferme, ce qui a créé une forte concurrence, avant que le soufflé retombe. Olivier Cordey, de Bio Fruits, à Vétroz (VS), pointe en outre « le décalage dû à la canicule, qui a avancé les récoltes de deux semaines, alors que les gens étaient encore en vacances » .
La question des marges
Cofondateur du réseau Chez Mamie, Olivier Richard ne mâche pas ses mots: « L'agroalimentaire a lancé le bio industriel, en prenant au passage des marges considérables. Les nôtres sont deux fois inférieures. « Idée reçue » , répond Tristan Cerf: « Les produits labellisés génèrent des coûts nettement plus élevés. De plus, avec la forte concurrence des autres détaillants et le tourisme d'achat, il serait impossible de réaliser une marge plus élevée avec des produits labellisés. »
« Le problème, déplore Rebecca Eggenberger, spécialiste alimentation de la FRC, c'est que les détaillants ne publient pas leurs marges et que le système reste opaque. » Quant à la faîtière Bio Suisse, « la politique de marge des distributeurs n'est pas de son ressort » , indique son porte-parole David Herrmann. IVAN RADJA
« Les affaires ont chuté dès le début de la guerre en Ukraine. »
Catherine Matthey, propriétaire du magasin bio Céres Autrement, à Neuchâtel
Le pouvoir d'achat a un impact sur la vente de produits bio. Martial Trezzini/Keystone
Depuis la fin de l'indexation des salaires sur l'inflation en 1983, les salaires augmentent moins vite que l'augmentation des prix.