Depuis que j'ai fait une petite visite à la déchetterie, (que l'on peut voir dans l'émission passerelles sur canal alpha...) j'ai vu la réalité de l'ampleur des dégâts de notre société de consommation.
Ce que j'ai appris dans cette déchetterie m'a beaucoup marqué. Par exemple, le fait que le nombre de télévisions amenées à la déchetterie en 2010 a triplé juste par ce que la publicité nous disait que la coupe du monde de foot était l'occasion rêvée pour change son téléviseur cathodique en téléviseur à écran plat !
On jette ainsi de nombreux appareils qui fonctionnent encore.
S'adapter à la société ou adapter la société à soi-même ?
J'ai beaucoup de peine à me convaincre que le but de mon existence doit être de consommer pour être heureux !
.. de transformer le plus vite possible des ressources naturelles utilisables en déchets inutilisables.
Etant conscient de cette réalité, j'ai plusieurs options:
- Je peux me morfondre dans mon coin en me disant que je ne suis qu'un marginal inadapté à la société dans laquelle je vis.
- Je peux me dire que c'est moche, mais que c'est le système qui veut ça. Que finalement je n'en suis pas totalement responsable. Je ferme les yeux et tout continue.
- Je peux agir pour changer cette situation.
Comme je tente parfois de me culturer un peu le cerveau. J'ai eu l'occasion d'entendre et de retenir quelque jolies phrases de grands penseurs.
Jiddu Krishnamurti disait: Ce n’est pas un gage de bonne santé que d’être bien intégré dans une société profondément malade.
J'en conclu, que même si je suis un marginal dans cette société. Ce n'est pas une mauvaise chose !
Un compatriote de Krishnamurti, un certain Gandhi disait:
Sois le changement que tu veux voir dans le monde.
Ainsi, j'ai décidé que le fonctionnement de notre société de consommation ne me convient pas, et qu'il faut que ça change !
Donc que faire ?
Augmenter la durée de vie des objets est une solution qui me parait intéressante.
Le plus simple pour commencer, c'est de se dire qu'il ne faut pas que tout ces téléviseurs en bon état et autres objets ne finissent bêtement à la déchetterie par ce que l'on ne sais pas où les mettre ailleurs.
On doit bien trouver un moyen simple pour mettre en relation des gens qui veulent se séparer d'objets, avec des gens qui veulent en acquérir pour pas cher ?
C'est là que tout s'éclaircit dans mon esprit !
(réplique du film Oscar avec Louis de Funès)
Il existe déjà un moyen populaire d'augmenter la durée de vie des objets en leur offrant une nouvelle vie ailleurs. C'est ce que proposent les sites de vente aux enchères comme ricardo.ch !
Ricardo, tout comme e-bay sont de véritables cavernes d'Ali-baba où l'on trouve tout ce qui n'est plus dans le commerce. La distribution est totalement repensée par rapport à un circuit économique classique. On utilise une économie entre particuliers.
En creusant un peu plus, je découvre, ou redécouvre que cette idée d'un système économique direct entre particuliers est en fait une tendance déjà bien présente, et grandissante.
Pour continuer dans mon jeu de citation, je dirai que l'on entend bien le fracas de l'arbre qui tombe, mais pas le murmure de la forêt qui pousse !
On parle souvent de notre société de consommation et de tous les problèmes climatiques qu'elle provoque, mais rarement du système qui émergera sur les cendres de cette société.
En fouillant l'idée, j'ai découvert toute une nouvelle forme de système économique qui émerge. Ce système économique change de valeurs fondamentales.
Il n'est plus strictement un système capitaliste basé sur les valeurs d'individualisme et de concurrence. Le système responsable de la société de consommation qui nous fait consommer, individuellement, plus et plus souvent que son voisin, juste pour le rendre jaloux !
Ce nouveau système économique remet au goût du jour des valeurs de partage, de collaboration et de coopération.
Pour bien montrer que c'est une phase de transition entre deux systèmes, pour prendre un peu des valeurs de l'ancien monde et un peu des valeurs du nouveau, c'est sous le terme de consommation collaborative que l'on découvre ce nouveau système économique.
La consommation collaborative est déjà partout
Entrons dans le vif du sujet par des exemples. Si j'ai prévu un petit voyage à l'autre bout du monde, il est toujours plus sympa de loger chez l'habitant que dans une chambre d'hôtel froide et impersonnelle.
Il est possible depuis longtemps de s'inviter pour une nuit sur le canapé de quelqu'un... C'est ce que l'on appelle le couchsurfing. De nombreuses personnes s'organisent ainsi grâce au site web couchsurfing.org pour trouver ou offrir un hébergement.
Pour les gens qui n'ont pas trop envie de dormir sur un lit de fortune, mais qui veulent un meilleur confort.. (et donc aussi risquer de payer), il y a le site airbnb.com qui permet de trouver des locations pas chères, à la nuit, aux 4 coins du monde.
Voilà, on a de quoi se loger. Maintenant, il faut trouver de quoi se nourrir.
Voici donc le concept du site super-marmite.com qui propose de partager des repas. Il y a des gens qui proposent un repas chez eux et d'autres qui viennent manger. Puis, on partage les frais et tout le monde est gagnant et content.
Pour préparer à manger, il est utile d'avoir à disposition des ingrédients! La distribution de nourriture s'organise aussi de manière collaborative.
laruchequiditoui.fr est un concept qui propose de grouper des consommateurs et des producteurs de nourriture (bref des agriculteurs), d'une même région pour organiser une nouvelle forme, plus directe de distribution alimentaire. On est dans ce que l'on appelle, l'agriculture contractuelle de proximité.
Toujours dans la nourriture, on a le site lepotiron.fr (malheureusement disponible uniquement en France), qui propose aux particuliers de redistribuer les surplus de leur propre jardin.
En Suisse, il y a jarditroc.ch, une association genevoise qui a pour but de faire un troc de plantes de son jardin. Le troc aura lieu cette année le 16 avril 2011.
Pour en revenir à la manière de donner une seconde vie à nos objets, j'observe, de plus en plus souvent, sur Facebook des amies qui revendent leur habits à leur amies. Une simple photo du vêtement concerné est envoyée, puis c'est tout un marchandage digne des souks de Fès, qui s'établit dans les commentaires en dessous.
Parfois l'idée prend de l'ampleur et il y a carrément des comptes Facebook qui sont dédiés au vide dressing.
(Neuchâtel, Yverdon, Lausanne)
La force de cette idée réside dans le fait que c'est dans son réseau d'ami que l'on revend ses objets. Ainsi la confiance est maximale et comme les amis sont des gens que l'on voit régulièrement en chair et en os, il est facile de faire l'échange. Pas besoin de local de stockage.
En dehors des habits, pour les objets en général, le site goodscommons.org permet de donner une seconde vie à ses objets. A mon avis, il y a encore trop peu de solutions pour les objets. J'ai quelques idées à ce propos que j'aimerai bien creuser.
Pour se déplacer, il existe aussi de nombreux systèmes basés sur la consommation collaborative. Il y a le système bien connu en suisse qu'est mobility.ch
Mobility est une coopérative possédant tous ses véhicules, ses coopérateurs et usagers empruntent le véhicule qu'ils ont besoin au moment où il en ont besoin.
Il existe d'autres manières de partager des véhicules, par exemple, le site français livop.fr permet de partager des véhicules entre particuliers déjà propriétaires de voiture. Ainsi il peuvent partager leur véhicule pendant qu'il ne l'utilise pas. (en moyenne 90% du temps ! ... il y a du potentiel !)
Si l'on ne veut pas partager toute sa voiture, il y a moyen de juste partager une place dans voiture, pour un trajet, c'est ce que l'on fait avec le covoiturage qui s'organise autour du site: e-covoiturage.ch
Comme je l'ai déjà exprimé dernièrement sur ce blog, à mon avis, l'avenir de la mobilité va passer par des abonnements à des pack mobilité dans lesquels chaque abonné peut utiliser le moyen de transport le plus adapté du moment:
De la possibilité d'utiliser les transports publics, et/ou différentes sortes de véhicules, du vélo au véhicule utilitaire en passant par la petite voiture électrique et la grosse voiture familiale.
Ensuite, si l'on a envie de partager, mais que l'on ne sait pas trop quoi partager, sur le site easyswap.org il y a possibilité d'échanger des services ou des objets entre personnes de suisse romande et France voisine.
Le petit dernier arrivé dans le domaine des locations entre praticulier est tryngo.com/fr
Penser global, agir local
Le point commun de tous ces services est de concrétiser le slogan: penser global, agir local. On conçoit un site web qui est globalement accessible et qui permet de s'organiser de manière locale. Plusieurs communauté peuvent utiliser le même outils en parallèle.
C'est souvent une manière d'optimiser et de partager des ressources que tout le monde a, mais qu'il est difficile de partager sans infrastructure complexe pour le faire. Le web apporte cette infrastructure. Mais, c'est souvent le local qui a de la peine à se mettre en place.
Les clubs de partage d'objets ( par exemple, le club ichtus qui partage du matériel nautique) et les bibliothèques ne sont pas nouveaux. Ce qui est nouveau, c'est vraiment ces outils web globaux qui permettent de mettre en lien des gens et de gérer son organisation locale.
La consommation collaborative, c'est le retour du concept de bien commun. Anne-Catherine Menétrey dans un article paru dernièrement dans Le Temps, disait que l'on va vers une économie de fonctionnalité ou de contribution.
Vers une économie où l'on échange non plus des objets, mais des droits d'usage de ces objets.
Est-ce que ça va vraiment marcher ?
Est-ce que cette tendance n'est qu'une affabulation de ma part vu que de toute façon les événements majeurs de l'avenir ne sont pas prédictibles ?
À mon avis la tendance au partage et à la collaboration n'est pas qu'une simple mode passagère. La consommation collaborative est la convergence d'habitudes déjà existantes et d'une technologie qui devient mure pour gérer une nouvelle manière de s'organiser. C'est ce mariage qui est nouveau, pas les deux parties.
Je pense que ça va marcher, car le concept est basé sur des valeurs humaines et pas seulement sur la technologie.
La technologie est un amplificateur d'habitudes latentes. La technologie n'invente jamais directement de nouveaux comportements, elle amplifie ce qui existe déjà.
Depuis la nuit des temps, les ados, dans les salles de classe bavardent pendant les cours. Mais tout au plus, avant l'ère du téléphone mobile, c'était des messages sur des bouts de papier qui faisaient le tour de la classe. Maintenant les messages sur Facebook font le tour du monde !
Un système économique est un système collaboratif
Croyant encore que l'humain est un animal social qui aime collaborer et partager avec ses semblables. Je pense que la consommation collaborative a de l'avenir.
Cet idéal de partage et de collaboration n'est pas qu'un idéal, mais également la stratégie la plus efficace pour survivre dans un système économique.
Il ne faut pas oublier qu'un système économique est un système collaboratif. C'est un système qui est sensé combler les besoins de chacun. (ce que l'on oublie parfois et qui a pour conséquence que l'économie tourne en circuit fermé en détruisant des humains!)
Dans un système capitaliste, les règles de bases sont la concurrence et le profit individuel. Ce sont des règles égoistes. Adam Smith a expliqué que c'est grâce à cet égoïsme que le système capitaliste fonctionne. C'est ce qui permet d'obliger les gens à se spécialiser dans ce qu'ils savent le mieux faire et à collaborer.
Depuis le 18ème siècle de nombreuses études ont été faites dans le domaine de la théorie des jeux et des systèmes collaboratifs.
Pour le prouver, ils ont conçu une simulation comportant des individus de plusieurs couleurs qui ont des caractères choisis aléatoirement:
- altruiste, qui coopère avec tout le monde
- égoïste, qui ne coopère avec personne
- ethnocentriste, qui ne coopère qu'avec ceux de la même couleur
- extraverti, qui ne coopère qu'avec ceux de couleurs différentes
Les simulations montrent qu'à tous les coups, ce sont les ethnocentristes qui gagnent.
La conclusion que j'en tire, c'est que pour gagner dans un système collaboratif, et donc aussi dans un système économique, il ne faut ni être totalement altruiste (les idéalistes), ni totalement égoïste (les valeurs capitalistes pures).
La meilleures stratégie est de partager avec ses semblables, avec ceux qui partagent aussi avec nous. Il faut créer un bien commun qui n'est accessible qu'en y contribuant.
Dans un domaine un peu différent, c'est cette stratégie virale qui est appliqué par la licence GPL très utilisée dans les logiciels libres. Tu as accès à tout le code qui est déjà écrit pour autant que tu donne aussi le tiens !
Le piège de tout système collaboratif est de trouver le juste équilibre qui fait que personne ne soit perçu comme un profiteur du système.
Les systèmes de consommation collaborative qui vont être mis en place doivent faire attention à ce piège, mais sinon, je suis confiant, la tendance va se renforcer.
On va de plus en plus vers des systèmes de gestion et de distribution entre pairs, (p2p) entre particuliers sans plus passer par des intermédiaires. Ceci souvent à l'intérieur de communautés de confiance.
Les commerçants et distributeurs traditionnels devront certainement se remettre en question si tout un commerce entre particuliers se développe.
Pour conclure, je dirais que la consommation collaborative me plait, car j'ai l'impression qu'elle s'inscrit bien dans une économie décroissante: une économie qui ne repose pas sur le dogme de la croissance économique.
La consommation collaborative permet de concrétiser le slogan: Moins de bien, plus de liens...