Comment déceler les tendances qui marquerons notre avenir ?
Beaucoup de gens cherchent à savoir de quoi l'avenir sera fait. Beaucoup de gens ont leur petite technique de boule de cristal.
Les technocrates et économistes aiment bien faire des graphes avec les données actuelles, puis prolonger les courbes pour montrer de quoi sera fait l'avenir. C'est en général totalement faux. Surtout si l'on fait appel a des courbes exponentielles.
C'est avec ce genre de raisonnement que les gens du 19ème siècle pensaient que les grandes villes seraient envahie d'une couche de 2m de crottin de cheval au 20ème siècle !
Qui avait prévu que l'on roule majoritairement au pétrole ?
Si l'on se plonge dans le monde de la bourse, on y découvre plein de gens qui inventent des techniques pour effectuer des placements sûrs. D'une certaine manière, il tentent de prédire l'avenir.
Les mathématiques sont infaillibles
En 1997, MM. Merton et Scholes ont même été récompensés en recevant le prix de la banque de suède en mémoire d'Alfred Nobel (trop souvent faussement nommé prix Nobel d'économie) pour leur contribution dans le modèle de Black-Scholes, un modèle mathématique sensé assurer des placements sûrs.
Forts de leurs croyance en ce modèle, MM. Merton et Scholes ont créé la société Long Term capital Management. Même le nom de cette société transpire de confiance absolue dans leur technique de prédiction de l'avenir.
Résultat, en 1998, (une année après leur récompense ! ) cette société est en quasi faillite. Faisant courir un risque majeur au système bancaire international.
La toute puissance des mathématiques pour prédire l'avenir, et en laquelle croyaient beaucoup d'économistes, s'effondre. Ce ne sont pas les mathématiques qu'il faut blâmer, mais le fait que ces gens ont construit un modèle mathématique correct sur des hypothèses fausses !
Les événements marquant de l'année (pas) vu par les médias
Chaque année, en décembre, les médias nous font une petite rétrospective des événements marquants de l'année écoulée. Certains médias poussent jusqu'à tenter de montrer quels seront les événements qui marqueront l'année d'après.
C'est ainsi que Xavier Colin s'est risqué à cet exercice, dans l'émission Geopolitis sur la TSR, qui avait pour titre: Bonnes ou mauvaises nouvelles ? que nous réserve 2011.
Cette émission nous fait découvrir quelques mariages princiers agendés et de nombreuses élections un peu partout dans le monde.
... Rien de très dur à prévoir... mais on ne sais jamais... Cette émission nous apprend que l'Egypte se rendra aux urnes pour élire un successeur à Hosni Moubarak, ce qui n'est pas faux... mais personne n'avait prédit qu'une révolte populaire mettrait précipitamment fin au règne du Raïs.
Personne n'avait prédit que l'auto-immolation d'un jeune marchand de légumes tunisien déclencherait des manifestations. Personne n'avait prédit que ces manifestations se répandraient dans tous le monde arabe grâce aux vidéos faites avec un téléphone samsung galaxy spica, par le cousin du marchand de légume martyr...
(étrange que samsung n'ai pas encore fait de pub pour son galaxy en disant que c'est un téléphone révolutionnaire !! )
Conclusion, cette émission Géopolitis était très intéressante, mais déjà totalement dépassée par les événements à peine un mois après sa diffusion !
Conclusion bis, on ne peut pas prévoir l'avenir. C'est peine perdue de tenter de le faire. Les événements majeurs qui influent vraiment sur nos vies et sur la marche du monde sont des événements totalement imprévisibles !
Les événement majeurs sont totalement imprévisibles
C'est ce qu'essaie de faire comprendre l'auteur Nassim Nicholas Taleb dans son livre "Le Cygne noir". Notre cerveau est piégé par de nombreux biais cognitifs qui lui font croire qu'il maitrise l'avenir. Mais l'expérience nous montre que c'est un hasard sauvage qui dirige l'avenir du monde !
Pour en savoir plus, voici le résumé que j'ai fait de ce livre...
Dans son livre, Taleb parle du principe d'induction. On pourrait aussi l'appeler, jusqu'ici tout va bien... donc il n'y a aucune raison pour que ça ne continue pas comme ça !
On a l'impression que le futur continue toujours comme le passé, et ce sentiment se renforce. Pourtant rien ne garanti qu'un jour un événement ne viendra pas tout bouleverser.
C'est l'exemple de la dinde qui est bien nourrie toute l'année. Plus le temps passe, plus elle est en confiance, ça fait tellement longtemps que ça dure que ça n'a aucune raison de changer. Ceci jusqu'à la semaine avant Noël, où la dinde passe à la casserole !
Jusqu'ici tout va bien. Notre centrale nucléaire n'a jamais eu de problème, il n'y a aucune raison que ça ne change...
C'est bien ce que pensaient nos amis japonnais et le monde entier avant qu'un tremblement de terre d'une magnitude jamais vue combiné à un tsunami n'endommage sérieusement quelques réacteurs nucléaires...
Bien que les japonnais soient préparés aux séismes et tsunami, cette catastrophe n'était pas prévue et ses conséquences dépassent tout ce que l'on avait imaginé.
En dehors des conséquences directes de l'accident, les conséquences sur le monde entier se font sentir.
Si, en début d'année, j'avais parié que la ministre de l'énergie de notre belle confédération, Doris Leuthard, allait prononcer un moratoire sur la construction de nouvelles centrales nucléaires, je crois que personne ne m'aurait cru !
Zut... j'ai loupé l'occasion de me faire un beau pactole !
Les événements les plus imprévisibles peuvent avoir des conséquences majeures sur nos vies et la marche du monde.
La loi de Murphy
Une fois un accident arrivé, beaucoup cherchent à trouver des coupables, des systèmes de sécurité qui ont mal été conçus, la cause du problème. Ceci souvent afin d'apprendre de ces erreurs et de concevoir un système infaillible. Mais est-ce vraiment possible de concevoir un système infaillible ?
N'est pas le propre de l'accident d'être un événement négatif contre lequel toute les sécurités ont été vaines?
Comme le dit la loi de Murphy: Tout ce qui peut potentiellement foirer.... va foirer !
Cette loi me semble empreinte d'une grande sagesse. Finalement, il faut considérer que toute chose est faillible.
Il faut être prêt a assumer les conséquences de tout accident, sachant que même si la probabilité est faible et que l'on fait tout pour qu'il ne se passe pas, il risque bien d'arriver un jour !
Déceler les tendances
Même si les grands événements de l'histoire sont bien souvent totalement imprévisibles. Il reste souvent possible d'identifier quelques grandes tendances qui sous-tendent l'histoire du monde.
Emannuel Todd a développé une théorie dans laquelle il explique que ce sont les systèmes familiaux qui déterminent l'évolution des sociétés humaines. Il arrive à prédire l'avenir de quelques civilisations en se basant sur des facteurs démographiques comme le taux de fécondité, le taux de mortalité infantile et l'alphabétisation.
Dans l'émission Babylone sur la RSR en février dernier, il explique comment s'est fabriqué le terreau favorable à la révolution qui a eu lieu en Tunisie et qui se propage dans d'autres pays.
Dans le domaine, des technologies, Howard Rheingold, a su déceler de nombreuses tendances avant qu'elle ne deviennent une réalité de tous les jours. Il a principalement étudié les communautés virtuelles sur internet, ou comment rendre les foules intelligentes. C'est d'ailleurs le titre d'un de ses livres dont mes notes de lectures sont disponibles par ici...
Sa technique est assez simple. Il observe les nouvelles possibilités de la technologie et il tente d'imaginer ce que pourrait donner un monde où cette technologie est appliquée à large échelle. Si la technologie apporte un plus par rapport aux comportement sociologique humain. Alors c'est une tendance à suivre.
Si l'on prend des élèves qui bavardent, en classe, entre eux, par des petits billets de papier qui circulent. Si on leur fourni des téléphones qui envoient des SMS, ou, mieux connectés sur Facebook, ça va marcher. Rien n'a fondamentalement changé. La technologie n'a fait qu'amplifier un comportement déjà présent.
La langue influence la manière d'appréhender le futur
Un paramètre que l'on néglige certainement, c'est la manière qu'ont les gens d'appréhender le futur.
Est ce qu'il sont actif ? passif ? Est ce que le futur est un libre arbitre ou un destin ? Dans certaines langues, on va chercher le futur et dans d'autres on attend qu'il vienne.
Selon les langues, le futur n'est pas construit de la même manière. A mon avis la langue conditionne souvent notre manière de penser.
Suivant mes maigres connaissances polyglottes voici quelques exemples de construction du futur dans quelques langues. J'espère que je ne me suis pas planté !
En arabe, une phrase au futur se construit en composant si dieu le veut (inch Allah) + le présent.
En anglais et en allemand on utilise les verbes vouloirs (i will... et werden), de même qu'en français et en anglais c'est le verbe aller qui est utilisé. (je vais aller faire... i'm going to...)
En finlandais l'action est plus passive, on laisse venir. En effet, c'est le verbe venir qui est utilisé.
Dans les langues latines, le futur est un temps qui est prévu. En grec ancien et en chinois, il y a un concept d'obligation au présent pour former le futur.
En allemand, même si le futur existe, c'est de plus en plus le présent mêlé au contexte qui est utilisé pour parler de futur. En hongrois, il faut prendre ou saisir le futur, c'est bien ce que signifie le verbe frog qui est utilisé pour construire le futur.
Et pour finir...
En guise de conclusion finale, je dirai que l'histoire est souvent faite d'événements totalement imprévisibles qui mettent en place une tendance latente depuis longtemps mais que peu de monde avait remarquée.
Donc pour tenter de savoir quel sera notre futur, il ne reste qu'à voir de quel terreau de tendances est fait notre présent.
Le futur est totalement ouvert à n'importe quel événement imprévisible. Pour se préparer, il vaut mieux avoir l'esprit ouvert et être capable d'imaginer même l'inimaginable.
Que sera le prochain événement majeur qui bouleversera l'histoire de l'humanité ?
Peut-être la rencontre avec une race extra-terrestre ? Qui sait ?