La monnaie est une des structures les plus influente de notre monde, et pourtant elle est très mal comprise. Voici de quoi comprendre ce qu’est vraiment la monnaie.
Le bâton de comptage, (tally stick en anglais) est un moyen de paiement qui a été utilisé pendant des siècles. Il était même encore reconnu jusqu'en 2016 dans le code civil français, art 1333:
"Les tailles corrélatives à leurs échantillons font foi entre les personnes qui sont dans l'usage de constater ainsi les fournitures qu'elles font ou reçoivent en détail."
Mais pourquoi on en parle jamais dans les bouquins d'économie ?
Pourquoi on nous rabâche toujours la fable du troc qui n'a jamais fait système et date d'Adam Smith.
Pourquoi les économistes adorent nous parler des petits coquillages d'iles lointaines, comme monnaie primitives alors que beaucoup, beaucoup plus près de nous dans l'espace et le temps, le bâton de comptage était le moyen de paiement principal !
Peut être que la simplicité et l'efficacité des bâtons de comptage n'arrangent pas les banquiers ? En effet, pas de crédit à intérêt, uniquement des reconnaissances de dette mutuelles dans une communauté.
Comment fonctionne un bâton de comptage
Dans cette vidéo, je montre à quoi ressemble un bâton de comptage, comment il était utilisé (par exemple pour acheter du pain à la taille), comment il est encore utilisé de manière folklorique dans les alpes suisses, avec les bâtons de comptage des vaches et les droits d'eau liés aux bisses valaisans.
Le principe est simple. Un bâton est fendu en deux dans la longueur. (sauf un petit bout de la souche).
Le bâton était souvent une branche de noisetier. Ou alors de manière plus élaborée, une petite planchette.
On obtient ainsi deux parties liées entre elles. C'est l'origine même du mot symbole qui vient du grec σύμβολον, súmbolon qui désigne un objet coupé en deux servant de signe de reconnaissance.
La grande partie est appelée la souche. La petite partie est appelée l'échantillon.
Les deux parties servent à enregistrer un contrat. On le fait en taillant une encoche sur les deux parties emboitées.
Ainsi une fois que l'on a séparé les deux bouts de bois, chacune des deux partie a une trace de la transaction et ne peut pas la réfuter ni la modifier.
Le commerçant (ou créancier) garde la souche c'est à lui que l'autre partie, le débiteur, celui qui garde l'échantillon, devra rembourser la dette.
C'est ainsi que l'on pouvait acheter "à la taille" de nombreuses choses dans des commerces. Par exemple du pain à la taille dans une boulangerie.
Le principe est simple, c'est le même que celui de l'ardoise de bistrot, ou de carnet du lait. On achète à crédit dans les commerces et périodiquement, une fois par mois, par exemple, on vient solder son compte en payant avec des pièces de monnaie.
(par exemple, mais il faut bien se rendre compte qu'à l'époque on différenciait bien mieux "moyen de paiement" et "unité de compte". Ainsi le bâton enregistre la valeur de la dette, mais elle peut être payée avec n'importe quel moyen de paiement d'un commun accord entre les parties. Ceci était très courant dans l'antiquité, par exemple vers -2500 on a un papyrus qui enregistre la vente d'une maison à Gizeh, la valeur est estimée à 10 shât et la maison est payée avec 2 tissus valant chacun 3 shât et un lit valant 4 shât. Pour bien comprendre toute cette histoire, je recommande de lire mon dossier sur l'histoire de la monnaie et des systèmes économiques. )
Il y a un point important à comprendre. C'est que la souche est elle même un moyen de paiement. Elle a de la valeur. Si tu es propriétaire d'une souche, c'est la preuve que quelqu'un te dois ce qui est indiqué dessus.
Ainsi si tu es boulangère et qu'on te paie 3 unités sur le bâton de comptage de ton commerce, tu détiens une reconnaissance de dette de 3 unités.
Si par hasard tu dois payer 3 unités au boucher. Et bien au lieu d'attendre que ton débiteur te paie ce qu'il te dois, tu peux toi même donner ta souche au boucher.
Payer avec des reconnaissances de dette c'est très courant. C'est ce que l'on fait à chaque fois avec un virement bancaire. Car ce qui est sur un compte bancaire n'est rien d'autre qu'une dette que la banque a envers son client.
C'est ça la magie de la "monnaie", c'est qu'à partir de rien, on crée un contrat qui enregistre une dette. La reconnaissance de dette sert de monnaie d'échange. On visualise bien ça avec un bâton de comptage. Mais c'est pareil avec un compte en banque et c'est important de le comprendre.
Ça signifie que rembourser toutes les dettes revient à détruire toute la monnaie ! (On brûle le bâton de comptage, une fois la dette remboursée)
Comment décoder ce qui est inscrit sur un bâton de comptage ?
Un bâton de comptage est un contrat. Tout comme sur un contrat papier il est possible d'écrire dans une langue ou dans une autre, sur un bâton de comptage, on peut écrire des codes différents pour enregistrer les informations du contrat.
La manière la plus simple, c'est de faire 1 encoche pour une unité. Mais ça fait vite beaucoup de coches pour les grands nombres.
J'ai testé une convention qui me semble plausible:
une encoche droite simple = 1 unité
une encoche en V = 10 unités
une encoche large = 100 unités.
Puis en regardant mes encoches je me suis dis que ça ressemble beaucoup aux chiffres romains !!
Peut être que c'est là une origine des chiffres romains ?
une encoche droite = 1 unité
une encoche en V = 5 unités
une encoche en X = 10 unités
... etc..
J'ai vu ce genre de code sur des bâtons de comptage. C'est peut être une piste intéressante !
"La manière de couper est la suivante: En haut du bâton de comptage, on fait une entaille de l'épaisseur de la paume de la main pour représenter mille livres ; puis cent livres par une entaille de la largeur du pouce ; vingt livres de la largeur de l'auriculaire ; une seule livre de la largeur d'un grain d'orge gonflé ; un shilling plus étroit qu'un penny est marqué par une seule entaille sans enlever de bois".
Utilisation de bâtons comme contrats et règlements
On voit avec l'exemple des bisses (aqueduc d'amenée d'eau dans les montagnes du Valais) que les bâtons de comptage sont quelques choses qui va au delà de la notion de monnaie et de moyen de paiement.
On est ici dans les véritables fondement de l'éco-nomie, soit étymologiquement: les règles de la maison.
La monnaie, les reconnaissances de dette, sont une partie de règles qui régissent une communauté, mais il y a en a de nombreuses autres non monétaires.
Par exemple le fait qu'un propriétaire de vache mette ses vaches à l'alpage et il veut en récupérer le même nombre lors de la désalpe, mais aussi surtout, il veut récupérer la production de fromage qui lui revient !
Les consortages pour gérer des biens communs
Depuis le moyen âge on trouve des communautés qui se sont organisées pour gérer des "Biens communs". Il s'agit souvent de droits d'eau, de droits liés aux pâturages et aux fromages produits, ainsi que des accès au bois d'une forêt, ou l'entretient de chemins et de four à pain.
Dans les régions alpines il existent encore plusieurs de ces organisations communautaires.
De nos jours, en économie, on oppose souvent la propriété privée et la propriété publique. Mais on oublie souvent la forme intermédiaire, soit la propriété enBiens communs. Ce n'est pas public... mais ce n'est pas une propriété exclusive. C'est une propriété d'une organisation.
En Valais on utilise souvent le terme de "Consortage".
C'est un texte de 1448 (toujours valable), signé par l'évêque de Sion de l'époque qui a prouvé les droits du consortage. La société hydroélectrique a donc du acheter le droit d'utiliser une partie de l'eau sans porter préjudice au bisse.
On voit par là que le consortage est un système très durable. Celà fait 572 ans que le consortage gère l'accès à l'eau dans cette région !
Les biens communs reviennent un peu à la mode. Ceci se voit notamment avec le (faux) "prix Nobel" d'économie donné à Elinor Ostrom en 2009 pour ses travaux sur les biens communs, notamment dans la gestion des consortages haut-valaisans.
Les "tachères" des bâtons pour enregistrer des règles
Dans des règles communautaires, il n'y a pas que des droits, mais il y a aussi des devoirs. On parle de tâches. C'est notamment l'entretien des bisses et les travaux collectifs.
Encore une fois je vois un lienentre cette manière de fonctionner séculaire des consortages et l'épicerie coopérative participative.
On est tous co-propriétaire de notre épicerie et l'on a tous des droits de consommer les produits avec des avantages, mais on a aussi des devoirs, celui de travailler l'équivalent de 3h par mois pour faire tourner l'épicerie.
Les gens étaient souvent illettrés, ainsi ce sont des dessins qui désignent les familles. Sur un bâton de comptage on retrouve aussi une marque de famille pour savoir à qui appartient le compte, qui est le créancier et qui est le débiteur.
Dans mes essais de fabrication de bâtons de comptage, j'ai reproduis des marques de famille en marquant le bois avec un clou de fer à cheval chauffé dans mon fourneau à bois. J'ai ainsi réalisé une pyrogravure qui semble plausible.
Je me suis inspiré de marques que l'on retrouve sur un panneau de marques de famille de la commune de Münster dans le haut valais.
Voici le panneau en entier:
Beaucoup de mots liés à la monnaie ont pour origine le bâton de comptage
L'étymologie de beaucoup de mots liés à la monnaie vient des bâtons de comptage.
Pourquoi est-ce que l'on parle de "débiter" un compte, comme on débite un tronc ?
Pourquoi est-ce que l'on a une "souche" sur un chéquier ?
"De Solomon fils d'Isaac, taille de 20'000 marks" avec le montant inscrit de ‘¾’ et daté de 1293-94.
Le mot "taille" est le nom d'une forme d'impôt direct. (en anglais Tallage) On voit tout de suite que le nom de cet impôt provient du nom du bâton de comptage sur lequel on inscrit le paiement !
La taille était un impôt très impopulaire, car il était arbitraire et les nobles et le clergé en était exemptés !
La malédiction du bâton de comptage sur ceux qui veulent le faire disparaitre
En 1694, un nouveau système arrive. C'est la création de la banque d'Angleterre. C'est une société privée qui va prêter au gouvernement £ 1,25 million. Une partie de cette sommes est prêté en or et une autre partie est enregistrée sur des bâtons de comptage. (A013/1)
En 1834 le poste de "Caissier de l'échiquier" (Teller of the Receipt of the Exchequer) a été supprimé. Marquant ainsi la fin du système de bâton de comptage en Angleterre.
Pour la petite histoire, l'échiquier, c'est un nom qui désigne, dans le duché de Normandie et en Angleterre, une sorte de "chambre des comptes". Le nom vient du fait que les comptables de l'époque utilisaient un plateau avec un damier comme celui d'un jeu d'échec pour aligner des jetons et faire leur comptabilité. C'est un moyen très visuel et pragmatique pour faire des calculs. C'est plus simple que notre manière actuelle d'écrire sur du papier.
Le bureau du caissier supprimé... il a fallu brûler les bâtons de comptage... et là c'est le drame !
L'idée est simple, avec le prélèvement d'une miette sur le trafic de paiement il est possible de collecter une somme plus grande que la totalité des impôts payés en Suisse, et donc de les remplacer.
Fini la corvée de la déclaration d'impôt, les niches fiscales et les effets de seuils.
Attention, ce n'est pas la fameuse taxe Tobin. Cette dernière ne veut taxer que les transactions financières. La microtaxe dont on parle taxe tous les paiements électroniques. Donc aussi vos courses au supermarché ou un repas au restaurant, et aussi les retraits au bancomat pour éviter de se soustraire à la microtaxe.
Pour l'économie réelle et l'énorme majorité de la population, c'est une charge en moins. Pour la finance, c'est moins bien. Mais la Suisse a tellement d'avantages dans ce domaine que toute cette branche économique ne disparaitra pas.
On va voir tout le détail ci dessous de ce projet de révolution de la fiscalité!
CHF 100 000 milliards d'échanges annuel entre les banques en Suisse, vraiment ?
Pour avoir un ordre de grandeur du potentiel d'une microtaxe, Felix Bölliger a été voir les statistiques de la Banque Nationale Suisse sur le trafic interbancaire.
Voici une vidéo qui explique le rôle du SIC, le réseau interbancaire qui connecte les banques entre-elles en Suisse pour assurer le trafic de paiement.
Les impôts cantonaux, communaux et fédéraux + les assurances maladie en 2011 avaient pour total CHF 170 milliards
Felix Bolliger conclu qu'un prélèvement de 2 pour mille suffit à remplacer les impôts. (soit 200 milliards pour remplacer 170 milliards)
La BNS modifie ses statistiques et supprime 60% du potentiel de la microtaxe !
"2013-01 A compter de janvier 2013, le nombre de transactions ne comprend plus les virements excédentaires et ne peut donc plus être comparé aux chiffres publiés jusqu’alors."
Heu ?? ça veut dire quoi ?
La meilleure explication que j'ai trouvé s'explique par le déplacement du compteur de transaction.
Les transactions entre le compte des banques à la BNS et le même compte chez SIX n'est plus comptabilisé. Ce qui est logique, car juridiquement c'est le même compte !! C'est juste un moyen technique pour que la BNS puisse faire ses stats.
Au delà du trafic interbancaire
Ci-dessus on ne parle que du trafic interbancaire. Mais pour tout ce qui reste dans la même banque, on n'en sais rien !! .... et c'est beaucoup plus gros !
Felix Bölliger s'est basé sur les stats de la BNS, car elles sont publiques. Mais beaucoup du trafic de paiement se fait à l'intérieur même des banques. Et là c'est opaque au possible.
Les banques commerciales ont le privilège de pouvoir créer de la monnaie, via le crédit bancaire. Elles publient leur bilan et leur comptabilité est contrôlée par un réviseur de compte. Mais en fait... beaucoup de choses restent très opaques dans la banque.
Qu'est-ce qu'il se passe entre deux bilans ? Le bilan n'est qu'une photo de la situation à un moment donné. Mais on peut imaginer qu'une banque se crée un matin CHF 1 milliards... joue avec en bourse, gagne quelques millions... et le soir rembourse le crédit. Ni vu ni connu ?
Il est sensé y avoir des mécanismes de contrôle interne aux banques. Mais on peut douter qu'un auto-contrôle fonctionne toujours...
L'expérience le montre avec l'affaire Kerviel. Il a réussi à frauder le contrôle interne de la banque en émettant de fausses informations. (bon, là paradoxalement, il créaient de fausses pertes pour masquer ses gains et passer sous le radar..)
Sinon, les banques sont aussi contrôlées par la FINMA, l'autorité de surveillance des banques. 🏦 .. oui mais.... Avec à sa tête un banquier anglais, ex cadre d'UBS.... c'est un peu au loup qu'on a donné la tâche de surveiller la bergerie !
On appelle ça une opération de portage.Moi j'appelle ça, "me créer pour moi même CHF 10 milliards". Et là... personne n'était au courant, sauf la FINMA.. et la FINMA a donné son feu vert !
On estime que la somme au bilans des banques des substituts monétaireslibellés en francs suisses CHF est d'environ le double du bilan de la BNS. Soit CHF 1600 milliards. (l'estimation a été faite en 2015.. on est certainement plutôt à 2000... mais faut refaire ce long calcul)
On peut encore doubler tout ça pour avoir le montant libellé dans des devises autres que le francs Suisse.
Puis il y a tout ce qui est de la finance... les actions mais aussi, les contrats divers et variées sont aussi des formes de monnaies !
... et tout ça s'échange parfois plusieurs fois par années... voir par seconde ! Ce qui génère un montant de transaction totalement astronomique !
Postfinance indique dans son rapport de gestion qu'elle traite un peu moins de 1 milliard de transactions par an. (avec CHF 113 milliards à son bilan réparti sur les 4.6 millions de comptes qu'elle gère)
Donc même si la BNS a changé ses statistiques et diminué de 60% le potentiel d'une microtaxe sur les paiements électroniques, ça ne change rien.
En fait si on applique aussi cette microtaxe sur les paiements entre les comptes d'une même banque, le potentiel est toujours là... et il est même beaucoup plus gros !
Quel est le potentiel d'une microtaxe sur les paiements électroniques ?
On voit qu'il y a en moyenne CHF 3 200 milliards / mois qui sont échangés. Ce qui nous donne un total annuel d'à peine moins de CHF 40 000 milliards par année.
A cela il faut ajouter tout le reste. Et là... on a très peu d'info. Mais tentons déjà de voir ce que l'on sait.
La bourse suisse est gérée par SIX. Ainsi on voit que pour ce qui concerne les transactions boursières on est dans l'ordre de grandeur de CHF 100 milliards par mois ( Soit un total de CHF 1361 milliards sur l'année 2018)
La taxe Tobin ne vise que les transactions financières, donc c'est juste ce potentiel là qu'elle aurait. La microtaxe sur les paiements électroniques vise plus large: tout paiement électronique.
Pour le trafic de transaction à l'interne des banques... aucune info supplémentaires pour le moment !!
C'est un point à creuser....
Financer un Revenu de Base Inconditionnel avec une microtaxe sur les paiements électroniques
En 2016, j'avais déjà fait une vidéo pour expliquer le financement du Revenu de Base Inconditionnel.
Dans cette vidéo j'avais déjà inclus l'idée d'une microtaxe de 0.05% sur les paiements électroniques qui permettait de récupérer CHF 50 milliards.
Avec ceci on peut clairement assurer un financement d'un revenu de base selon le modèle de financement mixte. (redistribution de la Valeur Ajoutée Nette des entreprises + microtaxe)
La microtaxe sur les paiements électroniques dans le débat aux élections fédérales d'octobre 2019
La microtaxe sur les paiements électroniques s'est invitée dans le débat des élections fédérales 2019 via la liste Démocratie Directe SpiritualitéS & Nature, que l'on trouve dans les cantons de Vaud (listes 11) et Fribourg (listes 24).
L'idée est de proposer une microtaxe de 0,1% sur les paiements électroniques, ceci afin d'avoir les moyens de faire une vraie démocratie.
On ne peut pas décider sans avoir les moyens de ses ambitions.
La microtaxe n'est qu'un emplâtre sur une jambe de bois
Il faut quand même émettre une critique sur cette microtaxe sur les paiements électroniques.
Vouloir changer la manière de faire la redistribution de la monnaie ne s'attaque pas au vrai problème qui est lié à la monnaie.
Une meilleure chose à faire c'est de vraiment reprendre le pouvoir de la création monétaire par le peuple pour le peuple. J'en parle déjà abondamment sur ce site 🙂
J'organise aussi régulièrement des parties du Jeu de la Monnaie, pour éveiller les gens à l'histoire de la monnaie, décoloniser leur imaginaire et proposer des alternatives.
Mais par les temps qui courent, peu de gens ont vraiment compris ce qu'est la monnaie et où est le problème.
Ainsi il est aussi intéressant de communiquer via cette idée de micro-taxe qui est beaucoup plus simple à comprendre.
Ce qui m'intéresse vraiment dans l'idée de remplacer les impôts par la micro-taxe sur les paiements électroniques, c'est que l'on va supprimer des impôts.
Là il y a encore moins de gens pour le comprendre, mais supprimer les impôts, c'est supprimer l'obligation d'utiliser une certaine forme de monnaie. Dès lors on peut commencer à librement utiliser des formes des monnaies alternatives plus vertueuses. (.. et du coup avoir beaucoup plus de moyens pour financer les infrastructures en commun et assurer la solidarité entre toutes et tous)
Il est possible de créer une microtaxe de 1 pour mille sur tous les paiements électroniques qui se font en Suisse, et ainsi être capable de remplacer TOUS les impôts. (TVA, impôts fédéraux, communaux, cantonaux, etc)
Une initiative populaire fédérale est en préparation pour mettre en place cette idées.
L'inconvénient pour moi de cette micro-taxe c'est de ne pas vraiment s'attaquer à la création monétaire. Mais en fait, avec son volet sur la suppression des impôts, elle le fait quand même !
Ceci, car le rôle des impôts est d'imposer l'utilisation d'une forme de monnaie. Avec la microtaxe sur les paiements électroniques, on se libère d'une bonne partie des impôts en place et ainsi on peut plus facilement utiliser des monnaies alternatives plus vertueuses.
Dans cet article on va aller voir la véritable origine de l'impôt.
J'aime bien aller explorer le pourquoi des choses, l'intention qui est derrière les choses. Quelle est donc l'intention derrière l'impôt ? A quoi ça sert les impôts ?
Quand je pose la question, en générale, j'ai plein de réponses, mais rarement la bonne !
Quel est le rôle de l'impôt ?
Donc le principe de l'impôt, c'est que chaque personne doit donner à l'Etat une certaine quantité de monnaie. C'est obligatoire. Si une personne ne paie pas ses impôts elle encourt une sanction.
Lors de soirées Jeu de la Monnaie, je pose cette question, à quoi sert l'impôt ?
Voici les réponses que j'ai:
à financer des infrastructure en commun
à payer les fonctionnaires
à financer les écoles et les hôpitaux
à financer l'armée
à assurer une certaine redistribution sociale des richesses
à payer les services sociaux
etc...
Toutes ces réponses ne sont pas fausses, mais c'est très rare qu'on me donne la réponse que j'attends !
Toutes ces réponses sont le reflet de ce que la plupart des gens pensent être le rôle de l'Etat. J'en ai déjà parlé dans mon article sur le contractualisme.
La véritable intention derrière l'impôt, c'est imposer...
Le nom impôt est clair pourtant, ça sert à imposer... mais imposer quoi ?
Voici donc la réponse que j'attends:
L'intention derrière l'impôt, c'est d'imposer l'utilisation d'une certaine monnaie.
Une croyance courante c'est que les humains ont besoin de monnaie pour s'organiser dans une économie. (étymologiquement: règles de la maison !)
Mais en fait les humains s'organisent très bien tout seuls avec du don et des reconnaissances de dette mutuelles.
Mais voilà que vers -700 à -600 suivant les endroits, une forme de monnaie a été inventée comme outils de domination. Comme outil pour une caste pour vivre sur le dos des autres. Cette forme de monnaie ne fonctionne que si on l'impose.... avec l'impôt !
Invention de la monnaie métallique et de l'impôt
Vers -700 à -600 simultanément en Chine, en Inde et en Lydie (Grèce antique) des "chef de gang" ont innovés et inventé une technique très efficace pour vivre sur le dos des autres.
C'est l'invention de la monnaie métallique, des pièces de monnaie.
Historiquement, il y avait des chefs de gang, des seigneurs (saigneurs !) locaux qui s'arrangeaient dans un système mafieux pour vivre sur le dos des autres:
Tu me donne une partie de ta récolte et je te massacre pas..... et mieux encore je te protège des autres gangs qui veulent te piquer ta récolte...
Vivre de razzia et racket c'est pas très efficace. Ça donne une mauvaise image et très souvent ça conduit à tuer les gens sur le dos des quels on aimerait vivre. Pas terrible.
C'est ainsi que la monnaie est un meilleur système. Prenons un exemple tout à fait historique.
Le roi Crésus, allait (faire) chercher de l'électrum, un alliage d'or et d'argent, dans la rivière Pactole. Avec cet électrum il fabriquait des pièces de monnaie.
Ces pièces d'or vont lui permettre d'acheter la récolte des paysans. Voilà donc l'innovation majeure, acheter au lieu de piller....
Mais est-ce très différent ?
Non pas vraiment, car ces pièces de monnaie ne coûtent pas grand chose à Crésus. Juste le coût d'extraction de l'électrum et de frappe des pièces.
La différence entre la valeur nominale attribuée à une pièce et son coût de fabrication est appeléele seigneuriage.
C'est en bref, le pouvoir d'achat "gratuit" qui revient de droit au seigneur qui a le monopole d'émission de la monnaie.
Donc c'est pas très différent d'aller voler aux paysans leur récolte ou de l'acheter avec de la monnaie qu'on a eu gratuitement... pour le seigneur, ça ne coûte rien ! C'est gratuit !
Une économie de marché est-elle possible sans impôts ?
Donc notre ami Crésus se dit qu'il va être gentil, au lieu de réquisitionner chez ses sujets ce qu'il lui faut, il va acheter.
Mais il va acheter à qui ?
Est-ce qu'il y a un marché ? Est-ce qu'il y a des gens qui vendent ?
Et bien non... si tout le monde est autonome, que tout le monde vit de sa récolte et complète ses propres récoltes par des dons entre les habitants. Pourquoi avoir envie/besoin de vendre au seigneur ?
Tout le monde s'en fiche !
Donc Crésus l'a dans l'os. Pas de marché.. rien à acheter !
Il faut donc créer un marché ! Comment on fait ?
Et bien il faut mettre en place un impôt !
Exemple du premier achat de récolte de blé
On va démontrer tout ça en racontant la petite histoire du premier achat de l'Histoire.
C'est l'histoire du soldat qui va acheter une récolte de blé à un paysan pour le compte de son seigneur:
« L’année dernière on a tué ton frère pour lui prendre sa récolte. Cette année tu as de la chance on a changé le système. On ne va pas te tuer, on va juste t’acheter ta récolte ! »
Mais le paysan à qui on fait cette proposition n’est pas d’accord. La rondelle de métal qu’on lui propose ne se mange pas ! Alors que se récolte oui. Il refuse donc de se faire acheter sa récolte.
C’est là qu’intervient l’impôt. Voici ce que répond au paysan le soldat chargé d’acheter la récolte:
« Tu veux pas te faire payer ? C’est dommage, car c’est ton seul moyen d’avoir de quoi payer l’impôt ! Oui oui.. En fait mon chef, le Seigneur dans son château, à la fin de l’année il va demander qu’on lui rende un certain nombre de rondelles. Si tu peux pas lui payer cet impôt, là on te met en prison. T’as le choix ! »
Le paysan, accepte... sans en réaliser totalement les implications futures...
Voici donc l’origine de l’impôt. En effet, sans ce mécanisme, il y a des gens qui pourraient sortir du système. Décider qu’ils n’ont pas besoin de monnaie pour vivre.
Mais avec l'impôt, le seigneur impose l'utilisation de SA monnaie, qu'il peut obtenir quasi gratuitement.
L'économie de marché est une conséquence de la monnaie et de l'impôt
Notre ami paysan, premier vendeur de l'histoire est content. Il a réussi à se débarrasser des soldats sans avoir du verser une seule goutte de sang. Il a perdu une partie de sa récolte. Mais c'est pas grave. Il a reçu de l'or en échange...
Il garde ses pièces, d'or, déjà par ce qu'il ne sait pas quoi en faire. Mais surtout car il a compris qu'on allait lui en demander à la fin de l'année... combien ?? Bonne question...
Il apprendra que le seigneur va lui en demander bien plus que ce qu'il a reçu en échange de la vente de son blé.
Ainsi le paysan, si il ne veut pas finir en prison ou pire.... va devoir s'arranger pour trouver encore quelques pièces d'or.
Ça tombe bien, notre ami paysan n'est pas le seul à avoir reçu des pièces d'or. En effet le seigneur à aussi été faire des emplettes dans chez d'autres paysans, et même chez quelques rares artisans, notamment un forgeron pour acheter quelques épées. ⚔️ 🗡
(ouais, le seigneur local a besoin d'équiper quelques soldats pour être certain de contraindre les paysans à payer l'impôt !)
Ainsi le forgeron a pas mal de boulot, il va gagner plein d'argent et d'or en vendant des épées. Mais du coup il n'a plus le temps de s'occuper de son jardin et de faire à manger pour lui.
Heureusement notre amis forgeron dispose de plein de monnaie et peut acheter ce dont il a besoin pour vivre (de la nourriture !) chez d'autres paysans.
Ainsi notre amis paysan 1er vendeur de l'histoire va vendre un peu de blé au forgeron. Tout le monde est content. Le forgeron a de quoi manger et le paysan de quoi payer son impôt.
Le seigneur est aussi très heureux. Car ainsi il obtient gratuitement à manger et de quoi équiper son armée. C'était pas si simple de voler des armes, car les forgerons expérimentés qui font de bonnes armes c'est plutôt rare et c'est dommage de les tuer. Avec la monnaie il est beaucoup plus heureux !!
Vu que maintenant dans le village tout le monde vend des choses. Il est décidé d'organiser officiellement une place de marché. Les gens qui ont des choses à vendre peuvent venir tous les samedi matin sur la grand place pour exposer leur produits. C'est nettement plus efficace pour mettre en relation des vendeurs et des acheteurs.
Voilà, l'économie de marché est née.
La monnaie un outil au service de l'expansion territoriale et technique
Le seigneur ayant vu que la place du marché se rempli bien il a décidé de mettre une taxe sur l'occupation d'un emplacement. Taxe payable uniquement dans sa monnaie. Génial une nouvelle forme d'impôt !
Du coup, pour encaisser les taxes et faire pression sur ceux qui rechignent à payer. Le seigneur (toujours plus saigneur...) a besoin de quelques soldats de plus dans son armée.
Il va donc pouvoir engager quelques soldats de plus grâce à son pouvoir de seigneuriage.
Progrès technique et concurrence : la spécialisation
Les nouveaux soldats du seigneur devront être équipés d'armes. Ce qui va donner encore du boulot au forgeron du village.
Notre ami forgeron occupe déjà tout son temps à fabriquer des épées, mais aussi des armures. Ainsi il cherche et trouve des techniques pour gagner du temps et améliorer son efficacité.
Il va aussi engager un apprenti pour l'aider et lui apprendre le métier.
Son voisin d'en face, même si il n'est pas forgeron chevronné, se dit qu'il y a du fric à se faire, donc il se met aussi à son compte comme forgeron....
La concurrence dans un marché libre est inventée.
Plus tard des corporations, avec des maitres, des compagnons et des apprentis se formerons pour contrôler et réguler le marché. Des écoles seront crées, la corporation deviendra une personne morale.... mais tout ceci est une musique d'avenir...
Tout comme le fait que le forgeron va fabriquer des épées, puis d'autres armes, et on va passer de l'arme blanche à la poudre à canon, puis des armes à feux aux fusées 🚀... (pour les missiles...)
Ainsi ici, le forgeron 🔨 est le premier employé de l'industrie de l'armement... et l'astronaute 👩🚀 en est toujours un... la conquête de la lune 🌔 s'est faite par des militaires...
Je te laisse méditer sur l'intention derrière le progrès technique..... ... besoin de fric... et financement de l'industrie de la mort.... 💀
Besoin de croissance infinie.....
Armée professionnelle
Revenons à notre seigneur qui est très content d'avoir plusieurs marchands d'armes à disposition pour équiper son armée.
Historiquement, ce n'était pas simple d'avoir une armée. Il n'y avait que des "nobles", le chef de gang, sa famille et quelques compagnons (étymologie du titre de noblesse "comte") qui avaient le temps de s'entrainer au maniement des armes.
Donc ça donne une armée, forte, mais très très petite en nombre.
Il y avait aussi parfois des armées composées de paysans. Donc en grand nombre, mais sans vraies armes, et sans entrainement.
L'invention de la monnaie, permet de payer de gens pour ne devenir que soldat: des mercenaires.
Les soldats deviennent les premiers salariés de l'histoire.
... et quand on a une grande armée, il se passe quoi ?
Expansion territoriale, naissance des empires
Quand un seigneur dispose d'une grande armée, il est vite tenté d'aller imposer sa monnaie sur un territoire un peu plus grand.
Avant la monnaie, c'était dur, notamment pour les raisons évoquées ci-dessus, l'armée était trop petite ou trop mal entrainée.
Mais aussi car les systèmes économique utilisés, des reconnaissances de dettes mutuelles, impliquaient d'être intégré dans un tissus social.
Or, le soldat en territoire ennemi qui massacre tout le monde n'est pas très bien intégré dans un tissus social.
De plus, plus la conquête avance, plus faire venir de la nourriture depuis le château du seigneur est de plus en plus compliqué. Ainsi les anciennes conquêtes étaient limitée en distance. Mais la possibilité d'acheter la nourriture sur place, permet une expansion territoriale énorme.
Le processus devient simple:
conquérir un territoire avec une armée professionnelle
mettre en place l'obligation de payer un impôt
acheter tout ce dont tu as besoin avec des pièces de monnaie
Ainsi on obtient de nouvelles ressources qui vont étendre le territoire du seigneur.
La notion d'empire est inventée.
Un des exemples les plus emblématique est celui d'Alexandre le grand. Un prince Macédonien qui a passé sa courte vie à conquérir des territoires et les soumettre à l'impôts de son empire.
Les premières pièces de monnaie trouvée en Suisse étaient des pièces de monnaie à l'effigie de Philippe II de Macédoine. Le père d'Alexandre le Grand.
Minage et esclavage
Le pouvoir de seigneuriage a permis à notre petit seigneur d'acheter quasi gratuitement tout ce qu'il lui faut pour vivre et pour financer son arméeet ainsi devenir empereur.
Marchand d'arme est devenu la profession la plus lucrative dans un empire en expansion.
Mais qui dit expansion des achats, dit aussi expansion des paiements et donc des pièces d'or et d'argent !
D'où vient tout ce métal précieux utilisé pour faire des pièces de monnaie ?
Et bien la rivière Pactole dont nous avons parlé plus haut disposait de ressource en alliage électrum facile à obtenir.
Mais avec le temps, c'est devenu toujours plus dur. Le pouvoir de seigneuriage est devenu plus faible. Et si en plus il faut payer des gens pour aller cherche de l'or et de l'argent, ça diminue le pouvoir de seigneuriage.
Ainsi la solution trouvée pour assurer une grande création monétaire et un grand seigneuriage, c'est l'esclavage.
En effet, que faire de tous les gens qui ne paient pas les impôts ?
La prison ça coûte cher. La mort c'est pas très efficace. Ainsi l'esclavage pour aller chercher des métaux précieux, c'est nettement mieux.
Après l'orpaillage dans les rivières, c'est l'industrie minière qui a débutée.
Donc on ajoute au processus de conquête, une phase de prélèvement de quelques esclaves qu'on va mettre avec les gens qui n'ont pas réussi à payer leurs impôts.
L'expansion d'un empire dépend donc directement de sa capacité à produire de la monnaie.
Une autre source de métal possible était aussi toutes les statues et idoles religieuses qui se trouvaient dans les temples. Beaucoup ont été recyclées en pièces de monnaie.
Les empires ayant une monnaie basée sur le bronze et le fer (en Chine) ont eu plus de facilité à s'étendre que les empires avec une monnaie basée sur l'or et l'argent (Grèce).
Sources historiques sur l'histoire des impôts
Cette jolie histoire est sympathique. Mais est-ce qu'on a la preuve que ça s'est passé ainsi. J'ai jamais entendu ça dans mes bouquins d'histoire, ni dans mes bouquins d'économie !!
En effet, l'histoire de la monnaie est très méconnue. Et pourtant elle influence toujours nos vies.
Voici quelques extraits de ce livre et les références vers les sources historiques pour appuyer cette version méconnue de l'histoire.
L'impôt permet aux états (et leur souverain) de supplanter les systèmes économiques précédents
« Au fil de l’histoire, la raison la plus fréquente de s’endetter a toujours été la nécessité de réunir les sommes nécessaires pour payer l’impôt. »
« En décrétant que seules leurs propres pièces seraient acceptables pour régler les redevances, les amendes et les impôts, les Etats ont réussi à submerger les innombrables monnaies sociales qui existaient sur leur territoires et à instaurer une sort de marché national unifié. » D.Graeber
Chapitre 9: l’âge axial (p277 de Dette 5000 ans d’histoire)
Les souverains de l'antiquité se sont beaucoup intéressés aux liens entre monnaie, armée, esclaves et impôts
Aux quatre coins du monde la caste des gens qui avaient envie de vivre sur le dos des autres ont beaucoup étudié la monnaie et comment la mettre en place à leur profit.
« Il suffit de jeter un coup d’œil au traité de Kautilya, l’Arthasastra, au « cercle de souveraineté » sassanide ou au Discours sur le sel et le fer chinois pour constater que la plupart des monarques antiques passaient beaucoup de temps à réfléchir sur la relation entre mines, soldats, impôts et denrées alimentaires.
Presque tous ont conclu que créer des marchés n’était pas seulement commode pour nourrir les soldats, mais utile à bien d’autres fins : les gouvernants n’auraient plus à réquisitionner directement chez leurs sujets tout ce qu’il leur fallait, ou à trouver comment le produire sur les domaines ou dans les ateliers royaux. »
Extrait de: David Graeber. « Dette : 5000 ans d’histoire (Les Liens Qui Libèrent) (French Edition). » iBooks. p107…. mais p64 de mon édition papier»
Exemple de mise en place de l'impôt colonial à Madagascar pour soumettre les habitants de l'île
Un exemple de mise en « esclavage civilisé par le marché » avec la colonisation de Madagascar par les français.
« Mais le plus frappant a été le vocabulaire dont il s’est servi pour décrire cette capitation. Il l’a appelée l’« impôt moralisateur ». Autrement dit, cette fiscalité visait – pour adopter le langage de l’époque – à inculquer aux indigènes la valeur du travail. »
« On pourrait ne voir dans l’ensemble du projet qu’un mécanisme cynique pour soutirer à la paysannerie une main-d’œuvre bon marché, et c’était bien le but […]»
La suite de cette phrase que j’ai tronquée explique que le second but, c’est de créer de nouvelles habitudes de « luxe » qui rendrait dépendante Madagascar pendant longtemps de la France…
Extrait de: David Graeber. « Dette : 5000 ans d’histoire (Les Liens Qui Libèrent) (French Edition). » iBooks. p107 »
Histoire de la monnaie en vidéo: l'invention de la monnaie métallique et de l'impôt
La monnaie métallique n'est qu'un des nombreux épisodes de l'histoire de la monnaie, si tu veux en savoir plus je peux encore t'en raconter beaucoup. Mais sur un autre article, et même en vidéo:
Voici l'épisode 4 de ma série sur l'histoire de la monnaie. C'est l'épisode dans lequel j'y évoque l'origine de la monnaie métallique et de l'impôt:
Rôle de l'impôt de nos jours
Ainsi maintenant tu connais l'histoire. Tu connais l'origine de l'impôt. Tu sais que l'impôt n'est qu'un outil pour imposer l'utilisation d'une monnaie dont personne ne veut.
Depuis l'époque de l'invention de la monnaie métallique, 2700 ans se sont écoulés. La situation à un peu évolué, mais pas tant que ça !
Bref résumé de 2700 ans d'histoire
Grâce à l'utilisation de monnaie et de l'impôt des petits seigneurs locaux sont devenus de grands empereurs.
La monnaie s'est répandue partout. Le monde entier à été converti à l'utilisation de monnaie centralisée. Les moyens de règlements de dette et de comptabilité mutuelle ont été éradiqués, tellement la pression à "gagner sa vie" avec de la monnaie imposée est forte.
En vendant à tous les camps les marchands d'armes sont devenus plus riches que les seigneurs qui les engagent.
Les seigneurs ruinés se sont endettés auprès de riches marchants (d'armes...) pour continuer à faire la guerre.
Les créanciers des seigneurs ont acceptés de différer quasi à l'infini le remboursement de la dette, en échange du monopole donné par l'Etat de titriser la dette sous forme de billet de banque => la notion de banque centrale est née.
Les marchands sont devenus plus forts que les Etats. Grâce à la dette infinie, ils peuvent créer des quantités infinies de billets de banques.
La technique s'améliore toujours pour être plus efficace que la concurrence et ainsi obtenir plus facilement de la monnaie.
Un grand saut technique est franchi lors de la révolution industrielle qui permet d'exploiter l'énergie fossile plutôt que la force musculaire des esclaves.
Les infrastructures de la révolution industrielle coûtant très cher, (aciéries, train, navires, usines, etc...) les banques commerciales ont été inventées pour fournir tout de suite, un crédit en monnaie scripturale à rembourser plus tard.
Les banques commerciales ont pris le dessus de la création monétaire.
Les Etats ne font plus rien avec leur seigneuriage. (si il en reste un ! ... En suisse c'est le cas. L'Etat émet les pièces de monnaie, mais en France c'est la banque centrale qui le fait. L'Etat n'a donc plus rien !)
Les Etats ont conservé la notion d'impôt. Mais le circuit ne leur profitent plus.
Les Etats se financent via l'impôt, mais aussi via le crédit bancaire.
Les banques commerciales sont les grandes gagnantes.
L'Etat a augmenté ses dépenses et ne les finances plus par la création monétaire !
De nos jours la situation est beaucoup plus complexe. L'Etat a augmenté son train de vie, surtout depuis qu'il sert à autre chose que financer une armée.
L'impôt est utilisé pour financer le train de vie de l'Etat. (Armée, fonctionnaire, écoles, hôpitaux, subvention à l'économie, services sociaux, protection de l'environnement, etc..)
L'Etat impose toujours l'utilisation d'une monnaie en particulier, mais les citoyens ne peuvent plus payer les impôts avec la monnaie de l'Etat !
(Bon, techniquement, il est toujours possible de faire un versement en pièces de monnaie à un guichet de poste. Mais ensuite l'Etat va récupérer de la monnaie scripturale, soit des substituts monétaires sur un compte en banque...)
Conclusion, l'Etat a augmenté ses dépenses et ne les finances plus par la création monétaire.
Ainsi on comprend pourquoi personne ne répond juste à ma question "à quoi sert l'impôt". Tout le monde a l'habitude de la situation actuelle. Peu de gens connaissent l'intention de base de l'impôt.
Cependant cette fonction d'imposer l'utilisation d'une forme de monnaie existe toujours.
Les différentes formes d'impôts de nos jours
Si l'on considère qu'un impôt est ce qui impose l'utilisation d'une forme de monnaie, alors quelles sont les impôts existants de nos jours ?
Si je prend mon cas en Suisse. J'ai trouvé les impôts suivant:
impôt sur le revenu (communal, cantonal, et fédéral)
impôt sur la fortune (communal, cantonal et fédéral)
TVA (à chaque achat on paye l'utilisation de la monnaie !!L'acheteur pourrait acheter dans une autres monnaie, mais le vendeur lui doit payer la TVA dans la monnaie officielle)
impôt anticipé (prélèvement à la source de 35% des gains en capitaux sur les compte bancaires pour inciter les gens à déclarer leur compte aux autorités fiscales)
Assurance maladie (Cette assurance est obligatoire et les assurances n'acceptent pas, à priori qu'on les paie en autre monnaie que le CHF )
Assurance ménage (éventuellement Responsabilité Civile car c'est très fortement conseillé)
Taxe déchet suivant les lieux...
Taxe foncière suivant les lieux (les cantons de ZH, SZ, GL, ZG, SO, BL et AG ne pratiquent pas)
Valeur locative, même un propriétaire paye en impôt la valeur estimée d'un revenu si il avait loué son immeuble !!
les diverses taxes incitatives.... (Alcool, tabac, carburant, chauffage, autoroute, chien, etc..) Il suffit de suivre l'incitation.. on est moins libre d'un côté.. mais de l'autre oui !
(la taxe d'habitation française, n'existe pas sous cette forme en suisse)
(La taxe professionnelle française n'existe pas en suisse)
Ce qui m'étonne c'est qu'il n'y a pratiquement eu aucun débat sur le sujet ! Le parlement était à l'unanimité pour ces impôts ! L'immense majorité des partis étaient pour.
Aucun débat public n'a eu lieu ! C'est quand même incroyable !
Ceci alors qu'à longueur d'année les partis de droites comme le PLR tapent sur les impôts trop élevés...
... et les partis de gauche comme le POP tapent sur la TVA, cet impôt injuste qui frappent tout le monde de la même manière que l'on soit riche ou pauvre.
Mais là, POP et PLR ont recommandé de reconduire ces impôts !! Incroyable!
Mais il faut préciser quand même que le même jour il y avait un autre sujet de votation qui a fait grand bruit. Probablement une des votations qui a fait le plus de débat ces dernières années.
Evidemment, les journalistes (surtout ceux dont le jobs dépend directement du résultat de la votation) ont beaucoup plus parlé de cette votation et organisé de nombreux débats.
Alors que fondamentalement, si l'on regarde les montants en jeu. La décision à propos de la redevance radio-TV est beaucoup moins importante.
Bref, le même jour, le 4 mars 2018, les Suisses on voté avec une très large majorité pour la continuité de 3 formes d'impôts différentes qui vont les piéger encore longtemps dans un système monétaire précis.
... et 3 mois plus tard, les mêmes ont refusé l'initiative monnaie pleine qui proposait de crée de la monnaie sans dette et de donner la possibilité de la distribuer aux personnes directement.
Ainsi la majorité des Suisse, probablement par ignorance, plébiscitent un système monétaire qui leur est majoritairement défavorable !
L'impôt empêche les systèmes économiques alternatifs
Il y a des nombreuses personnes qui aimeraient changer de système économique.
Chaque fois c'est le même discours, il faut investir massivement pour inciter les gens à utiliser les Monnaies Locales Complémentaires, et ça ne marche pas....
J'ai organisé à chaque fois une partie du Jeu de la Monnaie. Donc il n'y a que des fans des Monnaies Locales Complémentaires, des gens qui se battent pour les faire utiliser.
Je veux pas des tes cacahuètes 🥜, une monnaie de singe 🐵 J'ai un crédit à rembourser et des impôts à payer dans une autres monnaie. C'est déjà assez dur comme ça...
Voilà on a tout résumé.
Ainsi pour faire fonctionner une économie autrement. Il ne suffit pas de proposer des monnaies alternatives (Ça me fait penser aux inconditionnels de la monnaie libre Ğ1 qui pensent que tout va se résoudre en utilisant cette monnaie !)
Il faut également réduire, voir supprimer sa dépendance à des monnaies prédatrices qui permettent à une caste de vivre sur le dos des autres en profitant de leur pouvoir de seigneuriage.
Ceci peut se faire, soit en échappant le plus possible aux impôts, soit en permettant de payer des impôts dans des monnaies moins prédatrices.
Les créateurs de Monnaies Locales Complémentaires devraient penser à ça.
Conclusions
On a donc vu dans cet article, que l'intention première de l'impôt, c'est d'imposer une forme de monnaie dont personne ne veut sauf le seigneur (saigneur) qui en a le monopole d'émission et qui profite de son pouvoir de seigneuriage pour vivre sur le dos des autres.
On a vu que ce système monnaie métallique + impôts génère la création d'une économie de marché, ainsi que la concurrence entre les personnes pour gagner plus d'argent et ainsi tenter de se libérer au maximum de l'impôt.
Une autre conséquence d'avoir à "gagner sa vie" sous la forme de "gagner de la monnaie" pour payer les impôts, c'est que l'on favorise le progrès technique, la recherche de l'efficacité par le progrès technique.
On peut se poser la question de savoir si notre civilisation serait autant "avancée" sur le plan technique si on avait eu un autre type de monnaie ?
Encore une autre conséquence de ce système monétaire de type jeton-valeur métallique et non de reconnaissance de dettes mutuelle dans une communauté de confiance, c'est le fait qu'il est très efficace pour favoriser la création d'une armée efficace. Ceci d'autant plus que la course à la technique et l'économie de marché avec des acteurs en concurrence va d'autant plus favoriser la création de nouvelles armes plus efficaces.
Il n'est donc pas étonnant de voir que le moment de l'invention du système monnaie métallique + impôt est le moment de l'émergence de grands empires basé sur l'expansion guerrière.
C'est pour cette raison que le peuple vote quasi systématiquement contre ses intérêts dans les votations sur ce genre de sujets.
J'espère ainsi contribuer la moindre à une meilleure compréhension du sujet des impôts et de la monnaie et faire émerger un système qui me semble plus juste et qui ne nécessite pas d'impôt ! ... même pour réaliser les tâches que l'on attribue généralement à l'Etat..
Si tu veux en savoir plus c'est par ici... Il s'agit du kong, une nouvelle monnaie de singe... 🐵 C'est du low-tech basé sur des carnets où l'on pratique une comptabilité, on sécurise le tout avec des signatures croisées comme pour un contrat.
Et chaque mois, chaque personne reçoit son revenu de base. Pas besoin de banquier, ni de saigneur, pour faire la monnaie....